Article écrit par : Pr E. Filaire, Anaïs Georgeault et Dr C. Poinsot du groupe Icare, Olivier Perraud d’Ingenica-LLI

Dans le cadre de la pandémie, la question de la réutilisation des masques respiratoires se pose de façon récurrente. Toutefois, aucune méthode de désinfection n’a été validée à ce jour, ce qui a conduit le groupe Icare et la société Ingénica à évaluer l’efficacité d’un procédé aux UV-C.

Le SARS-CoV-2, membre de la famille des coronavirus, est le septième coronavirus pathogène pour l’homme. Ce virus se transmet depuis une personne infectée vers une personne non infectée par deux voies principales : 

  1. le contact direct avec la personne infectée ou une surface qu’elle a contaminée 
  2. la transmission aéroportée du virus via des gouttelettes (1μm à 1mm) ou un aérosol (suspensions de particules de quelques nanomètres à 100 μm) émis par la personne infectée.

Dans le cadre de cette pandémie, la fourniture des équipements de protection individuelle (EPI) a été fortement soumise à des problèmes de disponibilité induisant des perturbations au sein des services de santé. Or, l’accès aux EPI pour le personnel de santé a été identifié comme un facteur clé pour empêcher la transmission de cet agent pathogène respiratoire. En effet, les équipements respiratoires (masques médicaux/chirurgicaux et masques respiratoires filtrants (norme N95 ou FFP2 ou FFP3)) peuvent réduire le risque de transmission de près de 85%

S’est alors posée la question de leur réutilisation au moyen de procédés de décontamination, sans pour autant compromettre leur structure, leur intégrité et leur efficacité et sans risque de toxicité pour l’homme. Peu d’informations sur la décontamination sont disponibles. Par ailleurs, tout en préservant l’intégrité de filtration des masques, les procédures de décontamination doivent garantir l’inactivation complète des agents pathogènes contaminants.

Des méthodes de décontamination telles que l’éthanol, le peroxyde d’hydrogène vaporisé, la chaleur humide mais également les ultraviolets (UV) semblent prometteuses. Parmi les trois types de rayonnements UV, il apparaît que les UV-A et UV-B
n’offrent pas une efficacité germicide suffisante pour pouvoir être utilisés à des fins de désinfection. Les UV-C ont quant à eux une longueur d’onde plus courte et leur efficacité germicide serait fonction de la dose et de la longueur d’onde, avec un maximum d’efficacité à environ 260 nm.

 Alors même qu’il existe un certain nombre de métadonnées portant sur l’intérêt de la décontamination des masques permettant leur réutilisation, les fabricants continuent de recommander leur usage unique en raison de l’absence d’un protocole fondé sur des preuves qui aborde les paramètres fonctionnels. 

Dans ce contexte, le groupe Icare et la société Ingenica, en collaboration avec l’ANSES de Pioufragan, ont évalué l’efficacité d’un procédé de désinfection aux UV-C (bande des UV à 254 nm) sur des masques chirurgicaux inoculés par des spores bactériennes de Bacillus atrophaeus ATCC 9372. La capacité de pénétration des UV-C à l’intérieur du masque, la respirabilité, et les capacités de rétention de particules non viables ont également été mesurées.

Des tests basés sur l’inoculation d’une bactérie 

L’appareil de désinfection UV de masques se présentait sous la forme d’un dispositif en acier oxydable. Les masques chirurgicaux étaient de type Conformat Référence : 2868-10 – Lot : 19371056-615A/00137 utilisés pour les tests de pénétration. 

L’essai microbiologique a consisté en l’inoculation d’éprouvettes (disque de 5 cm de diamètre) issues de masques chirurgicaux par des spores bactériennes de Bacillus atrophaeus ATCC 9372. Ces éprouvettes étaient réparties sur l’ensemble des masques. L’inoculation a été réalisée en présence d’albumine par un procédé de nébulisation afin d’être le plus représentative possible des sources de contaminations réelles.

Les différentes valeurs obtenues ont permis d’établir une courbe de survie afin de déterminer la valeur D10 du procédé, cette valeur correspondant à la dose d’UV-C nécessaire pour réduire de 90 % la population de spores de Bacillus atrophaeus ATCC
9372. 

Des résultats probants 

Une exposition à 100 mJ.cm-2 permet une réduction de l’inoculum de départ supérieure ou égale à 4log 10, minimum nécessaire pour valider que le procédé a un effet désinfectant sporicide.

Le nombre possible de cycles d’utilisation et de désinfection (portage de 4 heures suivi d’une exposition à 1000 mJ.cm-2 d’UV-C précédé d’une décontamination à l’éthanol) des masques chirurgicaux testés sans altération de l’efficacité de filtration et des performances de respirabilité est compris entre 0 et 3. Si le niveau d’acceptation est celui de la catégorie 1 des masques à usage non sanitaire, le nombre de cycles possibles est de 10. A notre connaissance, aucune donnée n’existe quant à la désinfection sur le SARS-Cov-2. Néanmoins, les spores tels que Bacillus atrophaeus sont plus difficiles à décontaminer que les virus ; ainsi nos résultats peuvent être appliqués au SARSCoV-2.

Même si d’autres études sont nécessaires, il apparaît que la décontamination par la lumière UV-C peut être une méthode efficace. Par ailleurs, l’appareil testé permet à tout un chacun de décontaminer ses propres masques et de les réutiliser, ce qui limite les freins psychologiques du retraitement de masse et évite les problématiques de logistique. 

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